Gestion professionnelle des hostilités, des menaces, des insultes et de l’agressivité
Il existe différentes approches pour gérer les situations difficiles ou conflictuelles entre un conseiller et sa clientèle. Pour les clientes et clients, leurs proches et le personnel, ces situations tendues sont souvent très stressantes. Il existe des approches efficaces pour les désamorcer et ainsi éviter des préjudices, traumatismes psychiques ou blessures physiques chez les personnes assistées et les collaborateurs. L’une d’entre elles est la méthode ProDeMa®.
En tant qu'infirmier spécialisé dans le domaine psychosocial avec 20 ans d'expérience, j'étais régulièrement confronté à des « agressions » de formes et de degrés très différents. Il n'était pas rare que je me sente totalement impuissant et désemparé, ne sachant rien faire d'autre que de donner des consignes de comportement telles que « Veuillez vous calmer », « Ne criez pas si fort », etc. ou, lorsque la situation semblait inextricable, de recourir à la force et à la contrainte.
Ce sentiment d’impuissance m'a régulièrement poussé à rechercher des solutions alternatives. Grâce à la formation chez ProDeMa® et à la collaboration qui en a résulté, j'ai pu apprendre des techniques efficaces et utiles que je peux désormais appliquer et transmettre avec succès dans différents domaines. Aujourd'hui, je suis fier de porter le titre de formateur et partenaire de coopération de ProDeMa®. Il s’agit d’un concept de désescalade breveté et éprouvé, protégé par des droits d'auteur, qui place la sécurité au travail au centre de ses préoccupations.
On me demande souvent des solutions pour gérer des comportements difficiles, en espérant que je sorte alors ma baguette magique. Cependant, la désescalade s’applique à des situations exceptionnelles, qui nécessitent des solutions personnalisées. Je peux transmettre des principes, des méthodologies et des techniques, mais je ne possède pas de solution miracle.
L’agression – un terme aux multiples facettes et connotations
La première étape dans la gestion de l'agression est de définir le terme en tant que tel. « L’agression » comporte tant de facettes et de connotations qu'il convient d'abord de clarifier ce terme. Souvent, « l'agression » est liée à des processus d'appréciation ou de jugement personnels qui rendent la désescalade difficile. Dans la littérature spécialisée, la plupart des définitions sont formulées comme suit : l'agression est un comportement ciblé avec l’intention de nuire à autrui. Je suis d'accord avec l’aspect intentionnel et comportemental, mais il est légitime de se demander si l’objectif premier d’un client est de nuire ou s’il n’essaie pas plutôt de résoudre un problème, tout en éprouvant une souffrance intérieure.
Une de mes principales découvertes a été de réaliser que l'agressivité est un « comportement » et non pas une émotion. Dans le langage courant et dans nos schémas de pensée, ces deux aspects sont souvent confondus. Derrière chaque comportement humain se cache une émotion et derrière chaque émotion un besoin. Dans notre société, nous apprenons en général à réagir au comportement et non à l'émotion ou au besoin sous-jacent.
Lorsque nous nous sentons menacés, insultés et humiliés par une attitude « agressive », l’empathie peut très vite disparaître. Nous réagissons alors plus fortement à ce comportement, ce qui tend à entraîner une escalade symétrique... et c'est là que l'une des fonctions centrales de « l’agression » entre en jeu : à nos yeux, c’est toujours l’autre qui est agressif.
Différents niveaux de désescalade permettent d'identifier les causes. La communication aide ensuite à désamorcer la situation par le biais des émotions ou besoins des personnes concernées. Le module DS1 traite des structures ou aspects susceptibles de déclencher des agressions (p. ex. les temps d'attente, le bruit, les espaces restreints, les procédures de travail, le règlement intérieur, pour n'en citer que quelques-uns). Les structures standardisées imposent de nombreuses règles aux individus, et s’ils ne les respectent pas, ils sont considérés comme « non conformes » et sont tout de suite catalogués. Souvent, de simples mesures permettent de désamorcer les tensions et de réduire considérablement l'agressivité et la violence.
Nos propres processus d’appréciation et de transmission
Le module DS2 met l'accent sur nos propres processus d'appréciation et de transmission. En tant qu’êtres humains, nous avons tendance à porter un regard différent sur nos propres « comportements inappropriés » et ceux des autres. Nous considérons souvent que notre comportement est une réaction évidente à une situation, tandis que chez d'autres personnes, nous avons tendance à l’attribuer à leur caractère. Nous jugeons ainsi les comportements difficiles des patientes et patients, ainsi que des clientes et clients (il est comme ça...), et nous comportons en fonction de cette appréciation.
Parfois, ces modèles sont transmis à des équipes entières (p. ex. par une soi-disant hygiène mentale), de sorte que les collaboratrices et collaborateurs portent des jugements généralisés. « Avec ProDeMa®, j'ai découvert une approche systémique qui ne cherche pas à blâmer, mais à trouver des solutions.
En matière de désescalade, il est important de distinguer les modèles de conflit personnels et professionnels. Dans mon cadre privé, mes techniques de désescalade pourraient rapidement produire l’effet inverse de celui recherché et vice versa, raison pour laquelle les personnes participant à ProDeMa® s'exercent et s'entraînent à comprendre comment entendre ce qui est dit. En effet, la personne en pleine escalade nous dit toujours où le bât blesse, ce qui nécessite toutefois d’identifier « ce qui est dit entre les lignes ». Un autre avantage de cette approche est que les situations stressantes nous impactent moins et renferment donc en quelque sorte un modèle de résilience.
Déclencheurs internes
Le module DS3 aborde les déclencheurs internes du côté du patient, du client ou du résident. Il débute par des thèmes de base comme la faim et la soif et se poursuit par les besoins émotionnels et psychologiques (douleur, solitude, désespoir, manque d'autonomie, etc.). La désescalade s’apparente donc à une enquête, à la recherche d'indices. Quelles sont les informations cachées fournies par la patiente ou le patient ? S'agit-il plutôt de causes extérieures (DS1) ; y a-t-il eu un problème dans l'interaction (DS2) ; ou ai-je omis d’identifier quelque chose chez le patient (DS3) ? Les discussions de cas permettent donc de dégager diverses solutions : la cause est-elle une infection des voies urinaires ou la solitude ? Ce n'est que lorsque de tels thèmes sont identifiés que des solutions durables peuvent être développées. À ce stade, les professionnels devraient reconnaître que ce n'est pas la personne qui est « agressive », mais qu'elle se comporte au pire
« de manière agressive ». Ils doivent dès lors considérer l’agressivité comme une « tentative de communication socialement indésirable. »
Lorsque les déclencheurs sont évidents, la désescalade n'est pas difficile. La situation devient complexe lorsque l’aspect émotionnel prend le dessus ; impuissance, peur, désespoir, frustration, etc. Ces déclencheurs émotionnels ne sont communiqués qu'indirectement. Je les qualifie de « pièges », car ils ne sont en général pas identifiés dans la communication.
C'est à ce moment qu’intervient le module DS4. Outre l'aspect sécuritaire, la désescalade verbale comprend quatre étapes de communication qui aident les individus à redevenir maîtres de leurs ressources et les professionnels à voir au-delà du masque de l'agression.
Si ces quatre niveaux de désescalade sont compris et appliqués ensemble, de nombreuses situations peuvent être désamorcées. Le module DS4 (désescalade verbale) m’aide notamment à découvrir ce dont la personne a besoin, et les DS1 à DS3 permettent en général de trouver des idées de solutions. Une fois ces éléments combinés, la désescalade fonctionne.
Si les participants à ProDeMa® veulent « simplement apprendre une technique », je dois les mettre en garde : dans mon esprit, nous aboutissons alors à la manipulation, ce qui va à l'encontre de ma boussole morale. Ce n'est que lorsque nous nous respectons nous-mêmes et notre interlocuteur que nous obtenons une véritable désescalade. En présence de cette attitude fondamentale, nous faisons en général déjà au moins 50 % correctement.
Les modules DS5 et DS6 sont consacrés aux techniques de défense, de dégagement, de fuite et d'immobilisation. Toutes les techniques sont basées sur le principe de la simplicité, de la sécurité et de la prévention des blessures. Elles sont clairement dissociées de l'autodéfense ou des sports de combat.
Suivi et accompagnement
Après un événement, le module DS7, à savoir le suivi et l'accompagnement, est la dernière des phases. Le suivi concerne davantage la clientèle, tandis que l’accompagnement s’applique aux collaborateurs et collègues. Les deux parties doivent être prises en charge après des événements stressants. Cette démarche permet d'éviter les « situations récurrentes » et de réduire les éventuels traumatismes.
Pour terminer, un dernier conseil : un sujet très important, surtout dans les professions « d'aide », est d’intégrer que les personnes en pleine escalade ne veulent (dans un premier temps) pas de solution. Dans les situations de forte tension ou de stress, les processus mentaux changent dans le cerveau, raison pour laquelle les personnes en proie à une souffrance intérieure ont d'abord besoin d'une personne qui les soutient, et non de quelqu'un qui résout leurs problèmes ou leur dicte leur comportement. Dans la vie quotidienne, nous sommes cependant habitués à « toujours vouloir trouver une solution tout de suite » (avec de bonnes intentions), ce qui, dans de nombreux cas, produit l'effet inverse en situation de crise.